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21B-Offensive Nivelle, 16 avril 1917... => 20 avril
Par JD1876 dans 1916-1917 Interprète à l'Etat major des Brigades Russes en France le 12 Novembre 2017 à 20:1315 avril. Dimanche de Pâques - Temps beau jusqu'au soir -
À midi invités : Bielozersk, Riazantzeff, Sermionoff, Kriwenko - À table, le Général reçoit l'ordre suivant:
" À ne lire aux exécutants que la veille du jour J: "officiers, s/officiers et soldats, l'heure est venue ! Vive la France. Nivelle ».
La dernière variante du plan d'exploitation indique que nous devons faire notre jonction avec la 4ème Armée sur la Suippe - donc elle attaque aussi, en tournant Berru et Nogent par l'Est.
C'est bien, mais... trop beau !
À 14h, Réunion des Colonels et du Commandant de l'Artillerie à la tour blindée pour communication de l'heure H : demain matin 6 heures.
On discute sur les brêches, l'état de la préparation, destructive..... Le Colonel Defaucamberge est beaucoup plus satisfait que l'Infanterie-
Je dors un peu l'après-midi avec Dr Warypaieff et Kriwienko (nommé colonel du 2ème Régt).
Je monte à la tour : fumées et incendies chez les Allemands, qui répondent peu; cependant ils démolissent une batterie de 120 long à Thil et coupent nos câbles téléphoniques sous-plomb enterrés avec Thil.
À 16h vérification des montres, qui seront encore ajustées à H-3.
Dîner à 8h - Il pleut - la dépêche météorologique annonce pour demain : "Vent N.O., pluie, froid! " quelle guigne !-
Si le jour "J" avait été le 14, d'après le 1er ordre, ou même le 15, le temps eût été beau pour l'attaque.
(Ceci est écrit le lendemain, à 7h1/2, dans le parc du château de St Thierry, en attendant l'arrivée des 1ers prisonniers) -
16 avril. JOUR J - Je veille jusqu’à minuit pour faire le compte-rendu supplémentaire de 12 à 24 h - Je dors un peu malgré les coups de téléphone ; réveillé à 4h ; levé à 5 h. Déjeûner - Sors avec Abolsnazoff1 avant 6h...
Le Cap Lelong descend de la tour et me dit que la 1ère vague semble avoir passé avant le barrage. Je pars vers le parc du château de St Thierry et, en attendant « les clients », je vais sur la route de l’Archevêque. Nos avions volent dans les rafales à 100 m d’altitude – souvent cachés par les brumes. Toutes nos batteries tirent à toute allure – Le 400 sur le Château de Brimont – contre-batterie – des pies et des corbeaux dans les arbres du parc semblent inquiets – les obus passant au-dessus des arbres font un bruit d’ailes.
Sur la route, je rencontre les premiers blessés: 2 à 6 h52.
8h30 – les 1ers prisonniers arrivent. 500 avant le déjeuner...
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Dans le livre : Le corps expéditionnaire russe (Gorokhoff et Korliakov) la photo n°550 a comme légende " Un interprète interrogeant prisonniers allemands. L'interprète à cousu sur un manteau russe l'insigne des interprètes de l'armée française" . Il est quasiment certain que cet interprète est Joseph Duchêne. Cela correspond à son récit, de plus la ressemblance est flagrante avec une photo familiale plus tardive.
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17 Avril = Temps affreux. Je reste au P.C. le matin. Pas d’avions. Après-midi au parc du château. Le 1er Régt a 5 tués : Ianouchkiewitch1, Philewitch, Klinow, Fransurot, DeLaderrière. Blessés : Zalousky, Troïtsky, Dexpert (?).
On a apporté 2 mitrailleuses – téléphones – projecteurs - dans la cave du château.
À dîner, général Fraisse Ct de l’infanterie de la 152eD.I qui nous relève, celle que nous avions relevé à Mourmelon.
18 Avril – Mauvais temps – pluie. 8h 1/2 : 4 prisonniers. Je vais faire un tour – visibilité mauvaise, pas d’avions – Après-midi, je vais au Château – Trouvé 11 prisonniers + 4 envoyés le matin + 1 officier et 2 hommes par service santé.
À déjeuner, Gal Andrieu, Commandant de la 152 D.I et Gal Fraisse.
Le soir, on se prépare à progresser dans la poche, en avant du canal – mais des photos d’avions montrent nouveaux ouvrages Allds – Demain, l’artillerie lourde « les démolira ».
Avant dîner, sous la pluie et les obus, le Gal va à Courcy avec le Cap. Sermionoff3 et de Broglie – voyage mouvementé. Après le dîner, le Gal remet croix de guerre au Cap. Rakitine, au cap. Sermionoff et à de Broglie.
Veillé jusqu’à 3h – Faraut rentre du C.A. : nous aurions devant nous, 19 divisions contre 16 chez nous; 345 batteries.
Faraut, rédacteur du Petit Parisien raconte à Rakitine, sa carrière Japon !! etc…
19 avril. Passage du commandement 6h.
Je me lève à 6h (coucher à 3h) - déjeune, emballe.
Entend un officier raconter au Général Andrieu des histoires de tanks à Arrifontaine, nouvelles des opérations 6è et 7 è armées, etc-
Fait deux photos : Église et Mairie4. Passé par Terrasse et à Merfy – Déjeuner
(Archives personnelles – Saint Thierry l'église – Soldats Français)
[(Archives personnelles – Saint Thierry la mairie ) Derrière le soldat français, on remarquera l'affiche écrite en russe "Villes"]
- Oublié papiers que je dois porter à la Garenne de Gueux – Parti à cheval les chercher à P.C St Thierry – sans masque .
À l’allée un peu de gaz à l’entrée de St Thierry. – Vite, vite je reviens, les obus à gaz tombent par 4 à la minute. J’essaye de passer . le cheval refuse - heureusement - 1 tué, 2 asphyxiés.
Je respire les gaz en plein, saute à terre et me sauve vivement sur la terrasse par une brèche, tirant mon cheval, qui se prend dans les fils téléphoniques, se cache, pendant que les obus tombent à quelques pas …
Au château, attache cheval - Je descends dans la cave ambulance, respire oxygène. Les yeux me font mal. Le Gal, le colonel Rakitine et le capitaine Sermionoff arrivent: je me sens mal - couché un moment – lève - mal de tête - au moment où nous voulons partir avec le Gal des obus à gaz dans la cour du château -
Rentré à Merfy vers 4h.
- À 10h, soir - ordre chef Etat.Major. (arrivant du P.C.) de partir m’assurer que le cantonnement est bien fait à Courcelles-St-Brice pour le 1er Régiment. Il craint une erreur. Je commande l’auto, il vient lui-même avec Bielozersk. Éclairs des canons - bombardement continu - Rentrés à minuit. Couché dans la chambre du Cap. Lelong, la mienne étant prise par Sermionoff.
Violente canonnade – barrages français – Les Allemands tirent sur les batteries qui nous entourent – puis sur le village – 2 obus dans le jardin à 20m de ma fenêtre : ce sont des obus à gaz heureusement. Entre 4 et 5 h, impossible de dormir, tellement le tir est violent.
"Écrit le 20 au soir, sur la colline de Pargny, devant Reims pendant que la canonnade fait rage vers l’Est et le Nord "
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63535978/f82.image
1 Zanouchkewitch ? Klimoff?
2 Sous lieutenants français détachés à la brigade russe –cf fiches Mémoires des Hommes et memorial-genweb.
3 ? Colonel Georguï Iordanivitch Simonoff 3ème brigade / 5ème régiment d'infanterie spécial (Juillet 1916- Mai 1917)
5Col .Gauthoy = Colonel GOTUA ou GOTHUA
Ci-dessous : compte rendu de l'attaque par la 1ere Brigade Russe. Source Mémoires des Hommes " LES ARMÉES FRANÇAISES DANS LA GRANDE GUERRE "
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63535978/f35.image
Ci-dessous : Evolution des positions 16 et 17 avril 1917 / source : Mémoire de DEA Xavier CULOT/ Service Historique des Armées
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